une petite princesse ne devrait pas devenir la reine des putes. (geo)

C’était une soirée de folie, de celles où tu ne payais que ton entrée mais où tu parvenais quand même à finir avec 2 gramme dans chaque œil. Sérieusement, t’avais aucun souci avec l’alcool mais tu ne savais pas refuser quand on t’offrait un verre, encore moins après un dixième. Ou peut-être pas autant, tu ne savais plus trop, quand les shooters entraient dans le game, ça devenait difficile de compter. Un peu comme ce groupe de potes là, une équipe de foot du quartier qui venait fêter leur dernière victoire en date. Rien de dingue, c’était juste les gamins du quartier, pas de quoi te changer les pupilles en euros, mais comme tous les footeux, ils étaient délirants et certains d’entre eux plutôt mignons. Qu’on s’entende, les gamins de vingt ans, ce n’était pas vraiment ton type même s’ils étaient marrants et qu’ils avaient déjà passé plusieurs minutes à essayer de t’expliquer le principe de hors-jeu. Ils avaient beau s’y être mis à plusieurs, l’alcool que tu avais absorbé avait littéralement noyé tes neurones. Puis ce n’était pas tout mais tu t’en contrefoutais de ce hors-jeu à la con. Quand y’a but, y’a but merde à la fin. M’enfin, toi le foot tu ne t’y intéressais qu’en Coupe du Monde et ces gars là, tu te doutais bien qu’ils ne feraient jamais que jouer dans les patelins autour de Lyon. Heureusement qu’ils étaient mignons et qu’ils continuaient à te payer à boire. Imprudente gamine.
Comme si tu ne savais pas que l’alcool finissait toujours par te happer si tu ne prenais pas garde, comme si tu ne savais pas que ces types en chien n’attendaient qu’une chose, que tu sois assez faite pour te remonter la robe et tirer tes dessous. Comme si tu ne savais pas que tout ça ne rimait à rien. On allait finir par croire que t’étais vraiment aussi conne que t’en avais l’air alors que tu suivais sans trop réfléchir l’un d’eux vers l’extérieur. Il voulait discuter avec toi en privé qu’il avait dit, parce que t’étais la plus belle de la soirée et qu’il ne voulait pas que tu lui files entre les doigts. Tu ne savais plus exactement ce qu’il avait dit, tu savais juste que sitôt la porte refermée, il t’avait collée dans le mur, ventousé ses lèvres aux tiennes tandis que d’une main un peu gauche, il tentait de t’arracher ton string. Merde qu’est ce qu’il y avait de compliqué à ça ? Il était obligé de te faire mal en plus de ça ?
Puis d’un coup, plus rien. Tu ne comprenais pas trop. Genre il s’était émotionné dessus tout seul ou ? Ce n’est qu’en apercevant la silhouette imposante d’Aymen que tu compris pourquoi on te lâchait la grappe. Toi non plus tu ne voudrais pas te fritter avec lui. Enfin si évidemment, tu le faisais tous les jours…mais ce n’était pas pareil, tu savais très bien qu’il ne te frapperait jamais, aussi pénible sois-tu. Et le type, il n’avait pas l’air de vouloir s’y risquer non plus, limite c’était vexant. Alors quoi, t’en valais pas la peine ? Non, évidemment que non. « Mais tu fais quoi ? » tu lui demandes, boudeuse comme une enfant alors qu’il venait littéralement de te tirer d’un mauvais pas, voir d’un mauvais coup. Tu n’étais pas en état de te rendre compte de l’aide précieuse qu’il venait de t’apporter alors qu’il aurait aussi bien pu te laisser dans ta merde. Remettant tes vêtements en ordre, tu lui lançais un regard noir. « Ils vont dire quoi de moi maintenant ! » Oui, ça importait pour toi, parce que t’étais assez naïve pour croire que le regard des autres avait une quelconque importance.

T’étais tellement habituée à te comporter comme une traînée que tu ne te rendais même plus compte du mal que tu te faisais, à agir de la sorte. L’estime que tu foutais en boule pour le jeter au loin comme un vulgaire brouillon sans intérêt. Voilà trop longtemps déjà que tu perdais pied, à jouer ce jeu dangereux de la séduction, jeu que tu étais en train de perdre allègrement. Tu les connaissais pourtant tes limites, tu savais celles que tu ne devais pas franchir et pourtant, t’avais tellement peur de décevoir ou qu’on se détourne de toi que tu étais prête à sacrifier ta dignité pour des illusions. Des sourires factices, des affections chimériques. Et même en étant ronde comme une queue de pelle, tu savais au fond de toi que le geste d’Aymen avait été plus sincère et plus vraie que tous les mots et gestes que tu avais pu échanger au cours de la soirée et ça, c’était quand même pathétique.
Terminant de remettre de l’ordre dans tes vêtements, tu plaçais tes cheveux derrière tes oreilles d’un mouvement sec avant de les libérer dans la foulée, t’avançant vers lui d’un pas un peu chancelant, faisant claquer tes talons sur l’asphalte luisant. « C’est bon c’est bon ! » tu dis avec mauvaise foi en claquant de la langue. Tu savais très bien que le mot que tu étais supposée dire était merci mais ça t’écorcherait la langue de le faire et il le savait parfaitement. Au fond de toi, tu avais conscience de te comporter comme une salope avec lui mais en même temps, il l’avait bien cherché, non ? Non ? Evidemment, il ne le savait sans doute pas mais ta racoeur remontait bien des années plus tôt, pas seulement parce qu’il t’avait volé ta meilleure amie en obnubilant son esprit, non ça aurait été trop simple. C’était bien plus grave que ça, en choisissant la belle Manu, Aymen avait fait le terrible affront de te faire passer au second plan, disparue au profit de ton amie de toujours et ça, aussi fort l’aimais-tu, tu ne l’avais jamais digéré. A croire qu’il te les fallait vraiment tous, même ceux qui ne t’intéressaient pas, même ceux que tu ne pouvais pas avoir. Surtout ceux que tu ne pouvais pas avoir. Puis voilà qu’il reprit la parole, calmement, comme si la situation n’était qu’une vaste plaisanterie. Elle l’était sans doute pour lui, elle ne te faisait pas rire toi. « On en viole pas les filles comme moi ! » tu réponds en passant devant lui, lui jetant un regard un peu sombre. Non, on avait pas besoin de violer les filles comme toi, suffisait de les faire boire un coup de trop et c’était tout cuit. T’avançais encore quand ta cheville partit en vrille, manquant de peu de te faire effondrer. « Putain ! » tu t’énerves toute seule, lâchant toute la poésie dont tu étais capable. Ouais ce soit, t’étais quand même un peu au bout de ta vie et Aymen était aux premières loges pour y assister.