(F) AU CHOIX, TENTEE

Salomé était alors âgée de 14 ans et son frêle corps d’adolescente était secoué de sanglots. Recroquevillée sur elle-même, les genoux contre son torse et la tête baissée, ses épaules se soulevaient au rythme de ses pleurs, étouffant légèrement le son de sa tristesse. Ca faisait des heures qu’il était assis là, près d’elle, à essayer de la consoler et de lui faire entendre que la situation n’était pas aussi grave qu’elle n’en avait l’air, mais elle était plongée dans un chagrin sans fond et il savait qu’il n’y avait rien qu’il put faire pour l’en sortir. Lui, il s’était habité à tout ça, mais elle, elle ne cessait d’espérer et chaque nouvelle déception était plus dure à encaisser que la précédente. Sacha entoura de ses bras les épaules de sa sœur en l’attirant vers lui pour la contraindre à un peu de tendresse. Avec calme et bienveillance, il restait silencieux, se contentant d’attendre qu’elle termine d’extérioriser son désarroi. Après un moment, elle finit par relever la tête et ses yeux rougis et bouffis croisèrent les pupilles bleutées de son frère et une moue se dessina sur ses lèvres. Il l’embrassa sur le front et elle renifla longuement avant de dire « C’est toujours pareil, et tous les ans… Tous les ans je crois qu’il fera au moins l’effort de m’appeler, tu vois… Rien que ça, même un SMS ça m’irait tu vois… Juste un petit truc quoi, un « joyeux anniversaire », je serais prête à prendre le truc le plus pourri. En fait la vérité c’est qu’il n’y pense même pas. » Sacha pinça les lèvres sans la quitter des yeux et il haussa doucement les épaules, cherchant les mots justes, ou du moins, cherchant les mots qui pourraient ouvrir les yeux de sa cadette. « Tu sais, c’est un truc qui est pas vraiment important pour lui… Il y pense jamais. Faut pas que tu te mettes dans un état pareil pour ça. Le mieux que tu puisses faire c’est de ne rien attendre de sa part. Tu ne récolteras rien. » Salomé hocha la tête, elle savait que son frère avait raison même si au fond d’elle ça la tuait d’admette que son père se foutait royalement de son anniversaire. Sacha en avait fait les frais avant elle mais il avait réussi à prendre du recul sur la situation, il n’appelait son père plus que pour des questions d’argent. « Je trouve ça nul, on est ses enfants. Et on est plutôt cools. Et lui il préfère se pavaner dans des hotels grand luxe avec des pouffiasses. J’comprends vraiment pas… » elle soupira et essuya ses dernières larmes du revers de sa manche. Sacha lui adressa un sourire bienveillant et compréhensif, il était soulagé qu’elle soit calmée, elle allait pouvoir profiter de son anniversaire, quand même. Un peu. « Moi j’ai un super cadeau pour toi, tu vas voir, » lui souffla-t-il sur un ton mystérieux.