Conmigo (Antonin)

Les cours de philosophie n’ont jamais été vraiment son fort. Au fond, Antonin se demande ce qu’il fait encore à l’école. Il ne veut pas aller à l’université, il veut devenir joueur de tennis professionnel, et il ne laisse pas la place au doute, il y arrivera. Oui mais s’il est assis là en classe alors que la sonnerie s’apprête à retentir, c’est pour une bonne raison. Il est là pour Manon. Parce que passer ne serait-ce qu’une heure en sa compagnie le remplit de joie et de bonheur. Elle illumine ses journées, et évidemment les heures passées au lycée semblent n’être que des minutes. En sa compagnie, il parvenait à oublier le tennis. Ce n’était pas comme s’il écoutait véritablement ce que pouvait raconter la prof à propos de Descartes ou d’Emmanuel Kant, quand il regardait le tableau, il visualisait les tactiques qu’il avait mises au point avec son entraineur pour faire face à la majeure partie des adversaires. Il visionnait les schémas de jeux et les exercices physiques qu’il allait devoir mettre en place une fois la sonnerie perçante retentissant dans la pièce. Et puis, quand Manon parlait, il perdait le contrôle de tout. Il restait pendu à ses lèvres comme si elle prêchait une sainte parole. Le reste n’avait plus d’importance. Elle pouvait lui raconter qu’un chien dans la rue s’amusait à tourner sur lui-même qu’il boirait ses paroles de la même manière. Ah Manon, pourquoi lui fais-tu un tel effet ? Il n’a pas choisi Antonin de s’enticher, mais tu le rends dingue ! Mais quand sonnent dix-sept heures, Antonin attrape son sac à la volée et se hâte, quittant la salle le premier. Il avait prévenu son coach qu’il serait en retard à cause de son malheureux cours de philosophie, mais ce dernier ne lui avait donné droit qu’à dix minutes de retard, ce qui signifiait qu’il allait devoir courir sur le chemin pour s’échauffer. Mais alors qu’il quittait enfin le lycée, la douce voix de la jeune Delattre tinta à ses oreilles. Il savait ce que ça signifiait. Il allait rater l’entrainement, parce qu’il ne pouvait en définitive, rien refuser à la jolie blonde. S’arrêtant alors qu’elle lui posait la question fatidique, il se massa l’arrière du crâne, grimaçant : « Je… je suis déjà trop en retard de toute façon. » Lâcha-t-il comme un aveu, alors qu’il renonçait à aller taper la balle pour passer un temps précieux avec la jeune fille. « T’as envie de faire quelque chose en particulier ? » Demanda-t-il en passant un bras autour de ses épaules, comme pour lui signaler qu’il ne raterait un moment en sa compagnie sous aucun prétexte. « Je te paie un Starbucks ? A moins que tu préfères aller chez moi ? » C’était elle qui décidait. Il culpabilisait à peine de laisser son entraineur poireauter pour rien. Son père allait râler, parce qu’il le payait une fortune, mais c’était pour la bonne cause. Il n’avait qu’à poser les yeux sur le doux visage de l’adolescente pour se rendre compte qu’il avait pris la bonne décision. Elle passait avant tout.